La meilleure burrata de Paris se trouve chez Racines

Au cœur du passage des panoramas, Racines s’offre discrètement à l’appétit du chaland. Juste le temps de déflorer les suggestions du moment posées à la craie sur l’ardoise, il faut déjà décider, avec cette volonté qui distingue les gourmands, lequel on ne prendra pas. Car ce chef sarde est avant tout attaché aux goûts premiers, francs, ceux de l’authenticité du produit et de sa mise en valeur simple et goûteuse. Ecole du vrai et du juste il consolide sa foi et la notre dans le culte du produit pour lui-même, à la recherche de la denrée noble. Il présente une carte courte mais qui titille l’imaginaire et les papilles comme une terre à découvrir; toutes les attentes régalent autant qu’elles allèchent (tonnato vitello, popietta, tiramisu… l’Italie nous sort le grand jeu !) natures vivantes qui vous mettent l’eau à la bouche, ferveur qui transcende l’âme de ses marmites.

Pour apprécier l’éthique de cette table magistrale, toujours garder présent au palais, paysages et campagnes où des paysans patriotes se battent pour préserver leur patrimoine agricole et alimentaire. Ici règne l’esprit du frais, de la saison et du marché. On peut lésiner sur le bling, jamais sur la vertu. Enraciné dans son savoir et fidèle aux valeurs de l’origine, Simone Tondo n’a de cesse de débusquer la denrée noble ou le joyau du terroir qui raconte son histoire.
Ainsi en est-il de cette burrata généreuse et addictive (il en a testé plus de 40 avant de choisir celle qui trônerait dans notre assiette!) cet or blanc, crémeux à s’en damner, parsemée ce jour-là de noisettes du piémont et de cima di rapa, herbes amères. Ainsi en est-il de ces tagliatelles al ragu larges et al dente, tendrement entourées de la suavité de la joue de bœuf, réveillé par le soleil de la tomate. Ainsi en est-il de cette escouade de vins vivants qui épaule nos pâmoisons gustatives et en relève subtilement toute les nuances.

Un cuisinier ne peut plus aujourd’hui se contenter de faire la cuisine, il doit aussi savoir donner à manger. Donner à manger, c’est se soucier de l’éthique de l’assiette autant que de son esthétique, c’est choisir l’exergue du produit plutôt que l’ego du chef, c’est régaler d’abord et épater ensuite. Quand la recette va droit au but, que les goûts sont purs, les cuissons nettes, les dosages mesurés, les accords audacieux, la denrée cuisinée pour elle-même et qu’aucune fioriture ne vient ridiculiser le mets, alors la table n’a rien d’autre à démontrer que sa vocation à restituer une vérité simple, celle de l’instant et de l’endroit.