Etna

« Mais alors, si le monde n’a absolument aucun sens, qui nous empêche d’en inventer un ? » s’interroge Alice. En intégrant l’héroïne de Lewis Carroll dans sa fascinante « Orestie », présentée à l’Odéon, Romeo Castellucci illustre à merveille l’invention du sens. Pour le dîner, une même singularité s’impose : Etna, à 5 minutes à pied du théâtre.

Pourquoi « Etna » ? Parce que David Rougier, sommelier de son état et maître des lieux, a une fascination pour les vins de cette région. Il a donc créé Etna, bistrot à vins naturels et « cave à manger » (selon la belle définition du « Fooding ») pour donner libre cours à sa passion. Mais ici, singularité oblige, pas de carte des vins : selon le choix des plats et vos goûts, David vous conseille, fait tester et change la bouteille en souriant si cela ne vous plaît pas. Cet homme a tout compris à son métier et à ce qu’il convient de grignoter avec ses vins : les produits des meilleurs producteurs (Thiebault pour les légumes, Polmard pour la viande, Petrossian pour le poisson…), qu’il assemble et sert avec gaieté et générosité.

Vous vous régalerez du tarama de crabe (aérien et goûteux) ; des artichauts et tomates confites (croquants et frais) ; des concombres, radis et betteraves (délicieux, mais un trait de vinaigre balsamique blanc serait préférable au balsamique classique) ; du tartare de bœuf (fondant, avec de la matière, parfaitement assaisonné : un régal) ; du pastrami de veau d’Henry Jacob (tendre et gras : une merveille) ; des coquilles Saint-Jacques fumées (étonnantes). Le tout accompagné d’un cheverny d’Hervé Villemade bien droit, à l’acidité parfaite, ou d’un grenache d’Anne Paillet, au nez désarmant mais fruité et agréable.

D’autres merveilles à la carte, notamment rillettes de thon ; foie gras de canard ; saucisson à la truffe ; buns grillés au bœuf séché ou burrata de Salernes et oisettes torréfiées. Pas de dessert mais du fromage : brie de Meaux à la truffe, comté de 36 mois, bleu des Causses – demandez gentiment et avec le sourire, et vous aurez un peu des trois ! Pas de château-chalon avec le comté, mais un étonnant chenin (l’O2 Vigne) 2005 de chêne, oxydatif à souhait.

Après de telles découvertes, le sens de votre soirée s’imposera : surprise et plaisir !